Déborah Farnault

Portrait chinois :

Si j'étais une émotion : 
La passion.

Si j'étais un animal : 

Le dragon porte-bonheur Falkor de « l’Histoire sans fin ». Et si je dois répondre de manière plus terre à terre, le narval.

Si j'étais une déclaration d’amour : 
La déclaration d’amour de l’écrivain américain Brad Zellar à sa femme Kate. 

Si j'étais un lieu :
Les profondeurs de l’oc
éan Atlantique.

Ma musique du moment :


 


"With All Our Might"

With All Our Might" est un projet d’exposition et d’édition où confluent les questions de paysage, de climat et de société. Explorant les corrélations entre ces différentes notions, je façonne des images où la désertification de l’Ouest Américain devient une métaphore de l’assèchement de nos ressources et de notre humanité.

La Californie, cinquième puissance économique mondiale, est aux premières lignes du réchauffement climatique. Les vagues de chaleur, qui y sévissent depuis plusieurs années, ne sont pas de simples sécheresses temporaires ; elles sont bien le résultat d’une désertification progressive de la région.

Aux portes de Los Angeles, le désert californien est devenu le carrefour improbable d’une des régions agricoles les plus riches des États-Unis et d’une économie marginale, où la pauvreté, la criminalité et la drogue sont endémiques. Les montagnes attenantes constituent un terrain d’essais et d’entrainement pour l’armée américaine. Les barons de l’eau y livrent une bataille impitoyable aux collectivités territoriales, tandis que le Colorado River, surexploité, s’assèche à grande vitesse. Centre d’un curieux écosystème, la région est le théâtre d’un désastre écologique imminent.

Le réalisateur John Waters semble en avoir saisi l’essence, décrivant la mer de Salton notamment, comme un lieu “où l’utopie et l’apocalypse se rencontrent pour danser un tango sale” . Cette atmosphère de fin du monde n’a cependant pas empêché une population marginale de s’installer dans cette région du désert californien – par choix ou non, à court ou long terme.

Aux villages de caravanes, marinas à l’abandon, courses de buggy tout terrain et âmes échouées sur les rives de cette mer intérieure se juxtapose l’opulence de Palm Springs. Entre frivolité et fin des temps, en quête d’appartenance, nous nous retrouvons face à une frontière immatérielle et invisible : une vision sublime et détonante, où la beauté et l’horreur, l’abondance et la misère, le génie et le sordide cohabitent.

Dans un système qui glorifie la croissance, la productivité, la performance et la positivité à tout prix, nous nous retrouvons déconnectés de notre propre humanité, en difficulté face à la tâche qui s’offre à nous et nous dépasse.

À travers une approche topographique, je présente des images dénudées de tout artifice : quelques intérieurs silencieux, des visages fatigués et l’absence dans l’immensité de paysages arides – comme autant de naufragés d’un modèle économique capitaliste en rupture avec les crises de notre temps.

Accompagné d’une série de poèmes en prose, que j’ai pensés comme les paroles de musique pop indépendante américaine, « With All Our Might » aborde les notions de nostalgie, d’aliénation et d’un romantisme qui s’effrite sous la lumière implacable du désert californien.